Emissions de métaux lourds

Emissions de métaux lourds

Origine du polluant

Sous ce vocable sont regroupées les émissions de différents métaux qui présentent un caractère toxique pour l’environnement et la santé humaine. Les métaux lourds dont les émissions atmosphériques anthropiques doivent être rapportées annuellement aux instances internationales sont : le plomb (Pb), le cadmium (Cd), le mercure (Hg), le cuivre (Cu), le nickel (Ni), le sélénium (Se) et le zinc (Zn).
Ils existent naturellement mais en quantités très faibles dans les sols, l’eau et l’air. Des métaux peuvent être présents dans les poussières émises par les foyers de combustion, la circulation automobile, les activités de fabrication et de traitement des métaux, l’incinération des déchets. Le plomb, quant à lui, provenait surtout de l’ajout d’antidétonants dans les essences destinées aux véhicules automobiles. Il est également entré dans la composition de nombreuses peintures.

Ils sont souvent liés aux particules fines, à l’exception du mercure, qui est principalement gazeux. Une partie des métaux lourds dans l’atmosphère retombe aux alentours de leur source d’émissions, d’autres peuvent être transportés sur de longues distances par les courants aériens.

On retrouve principalement :

  • le plomb (Pb) qui est d’origine industrielle et automobile. Le plomb tétraéthyle était utilisé comme additif dans l’essence. A partir des années 90, des substituts ont été utilisés dans l’essence dite sans plomb. Mais, jusqu’en 2000, les essences pouvaient toujours contenir du plomb qui était émis à l’atmosphère lors de la combustion. Les émissions liées au transport ont ainsi décru de façon très importante. Les émissions industrielles sont, quant à elles, restées relativement stables. Des efforts ont été toutefois portés sur les gros émetteurs.
  • l’arsenic (As) qui est un élément extrêmement toxique. Dans le milieu naturel, on trouve de l’arsenic assez abondamment dans la croûte terrestre, et en petites quantités dans la roche, le sol, l’eau et l’air. Des procédés industriels tels que l’exploitation minière, la fonte de minerais et les centrales électriques au charbon contribuent tous à la présence d’arsenic dans l’air, l’eau et le sol. La contamination de l’environnement est également imputable à des pesticides agricoles et à des substances chimiques utilisées dans le traitement du bois qui contiennent de l’arsenic.
  • le cadmium (Cd) rejeté dans l’atmosphère provient de sources naturelles comme les éruptions volcaniques. Les activités industrielles sont la principale source de son émission dans l’air : fabrication des accumulateurs électriques, dans l’industrie électronique et chimique, la photographie et dans la métallisation des surfaces.
  • le nickel (Ni) provient principalement de la combustion de combustibles fossiles (charbons, fiouls…) et de certains procédés industriels de traitements de surface. Les émissions de nickel ont fortement diminué grâce à la diminution importante de la consommation de fuel lourd dans lequel la teneur en nickel est importante.

Effets

  • Effets sur la santé : L’impact sur la santé des métaux lourds est très variable. Certains métaux lourds sont plus toxiques que d’autres, mais celle-ci va également être très dépendante de la forme chimique selon laquelle se trouve le métal : selon son degré d’oxydation, selon les molécules minérales ou organiques auxquelles il est associé,…). Le mode d’entrée dans le corps humain aura également un impact (inhalation ou ingestion).

Parmi les métaux lourds :

  • l’arsenic est un élément extrêmement toxique, la forme trivalente étant plus toxique que la forme pentavalente. Il peut provoquer des cancers notamment des poumons ou de la peau.
  • le cadmium est un élément toxique (il perturbe le métabolisme du calcium avec notamment des dégâts rénaux) et cancérigène.
  • la toxicité du chrome varie fortement selon son état d’oxydation. Sous forme métallique Cr, il est stable et non toxique. Sous forme trivalente Cr3+, il est indispensable à la vie tandis que sous forme hexavalente Cr6+, il est hautement toxique et cancérigène.
  • le nickel est un élément hautement toxique notamment pour l’appareil respiratoire. Il est également mutagène et cancérigène.
  • l’antimoine est un élément toxique.
  • le mercure provoque des maladies immunologiques, cardiovasculaires, rénales et neurologiques. Les effets sur le système immunitaire apparaissent pour de très faibles concentrations.
  • le plomb est toxique pour le système nerveux et la plupart des organes vitaux (saturnisme).

 

  • Effets sur les écosystèmes : Certains métaux lourds vont avoir un impact sur les capacités reproductives des oiseaux et mammifères, d’autres sur leur système hormonal. Les écosystèmes forestiers subissent également un stress suite à l’accumulation de métaux lourds. Certaines surfaces agricoles subissent également une contamination par les métaux lourds suite à l’utilisation de certains sous-produits pour l’amendement/engraissage des sols (boues de station d’épuration, scories Thomas de déphosphoration issues de la fabrication d’acier).
  • Effets sur les biens et sur l’économie : Les métaux présents dans les gaz d’échappement comme le plomb, le fer, l’aluminium, le manganèse ou le nickel, peuvent servir de catalyseurs dans les phénomènes de dissolution du calcaire par les acides gazeux de l’atmosphère.

Secteurs les plus émetteurs

La composition du tissu industriel wallon, historiquement axé sur la sidérurgie, explique qu’en Région wallonne le secteur industriel a été, et est encore aujourd’hui, un des principaux secteurs émetteurs de métaux lourds.  Le secteur des transports devient le premier émetteur.  Les émissions sont principalement issues de l’usure des pneus et des freins.

Les trois secteurs suivants représentent plus de 94% des émissions de métaux lourds en Wallonie :

Évolution des émissions

Les émissions de métaux lourds ont fortement diminué depuis 1990.  Ceci est essentiellement dû aux mesures d’abattement des particules qui ont été prises via les permis d’environnement pour les industries et le secteur des producteurs d’énergie. La conjoncture économique et principalement la fermeture de la plupart des outils sidérurgiques ont également contribué à la réduction des émissions.  Le remplacement du charbon et du fuel lourd par le gaz naturel participe également à cette diminution.

Objectifs de réduction

Les émissions de métaux lourds sur le territoire belge sont soumises au niveau international au protocole UNECE d’Aarhus (dans le cadre de la Convention UNECE sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance.

Ce protocole d’Aarhus a pour objet de lutter contre les émissions de métaux lourds (plomb (Pb), cadmium (Cd) et mercure (Hg)), d’origine anthropique, qui sont transportées dans l’atmosphère à longue distance et qui sont susceptibles de provoquer des effets nocifs sur la santé ou sur l’environnement.  Il fixe pour cela un certain nombre d’obligations selon deux axes :

  • d’une part, une réduction des émissions totales de Cd, Hg, Pb par rapport à 1990 des sources industrielles (sidérurgie et industrie des métaux non ferreux), des processus de combustion (production d’énergie et transport) et de l’incinération des déchets ;
  • d’autre part, l’application de valeurs limites d’émission pour les sources stationnaires nouvelles (2 ans après l’entrée en vigueur du Protocole) et les sources existantes (8 ans après l’entrée en vigueur) et l’utilisation des Meilleures techniques disponibles (MTD).

Afin de veiller à l’application de ces dispositions, les Parties doivent réaliser des inventaires d’émissions des trois métaux lourds précités.

Le Protocole impose également de supprimer les carburants au plomb et d’appliquer des mesures en matière de produits contenant ces métaux lourds (essence, piles, composants électriques, appareils de mesure, amalgames dentaires, pesticides, peintures…).

Les dispositions européennes suivantes ont contribué à transposer le Protocole de 1998 dans le droit de l’Union et contribuent à transposer et mettre en œuvre au niveau européen le Protocole amendé :

  • la directive 2004/107 du 15 décembre 2004 concernant l’arsenic, le cadmium, le mercure, le nickel et les Hydrocarbures aromatiques polycycliques dans l’air ambiant.  Elle impose notamment une valeur cible pour la concentration de Cd dans l’air ambiant (5 ng/m3), établit des méthodes et des critères communs pour évaluer les concentrations, notamment, de Cd et de Hg dans l’air ambiant, et favorise la mise à la disposition du public des informations ;
  • la directive 2008/50 du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe, qui établit un cadre pour l’évaluation et la gestion de la qualité de l’air ambiant, et fixe notamment une valeur limite de protection de la santé pour le plomb (0.5µg/m3) ;
  • la directive 2010/75 relative aux émissions industrielles (remplaçant la directive IPPC) qui cible de manière intégrée l’impact environnemental que peuvent engendrer les activités industrielles, en visant notamment les rejets de substances dans l’air.  Elle définit les règles pour l’octroi des permis aux exploitations industrielles et impose l’application des Meilleures Technologies Disponibles, la surveillance des rejets et la diffusion de l’information au public.
  • les directives en matière de normes de produits (compétence fédérale), notamment la directive 98/70 fixant des teneurs en plomb dans l’essence, ainsi que toutes les directives ultérieures en matière de qualité des fuels et les directives 91/157 et 98/101 relatives aux piles et accumulateurs, remplacées par la directive 2006/66 (modifiée par la directive 2008/12), fixant notamment des normes en matière de Hg et Cd.
  • le mercure est également réglementé par la Convention de Minamata, adoptée en 2013 dans le cadre du PNUE (Programme des Nations Unies pour l’Environnement), et en cours de transposition par un règlement au niveau européen.  Elle vise non seulement les émissions de mercure et son usage dans des produits ou des processus industriels, mais aussi la gestion des déchets contenant du mercure, l’extraction, le stockage et le transport.  L’UE et la Belgique ont signé la Convention en 2013 et ont entamé le processus de ratification (au sein des trois Régions et du Fédéral).

Au niveau belge, le Protocole d’Aarhus est considéré comme mixte, c’est-à-dire qu’il ressortit des compétences fédérales et régionales.  

Les normes et certaines mesures de gestion des produits prévues dans les annexes VI et VII (teneur en plomb dans les carburants, mercure dans les piles, réduction de la concentration de métaux dans les produits…) sont du ressort des compétences fédérales et sont déjà mises en œuvre, essentiellement dans le cadre des dispositions européennes en matière de produit.

En ce qui concerne la Wallonie, la mise en œuvre du Protocole s’inscrit dans la législation existante wallonne, transposant les directives précitées, essentiellement :

  • l’Arrêté du Gouvernement wallon du 15 juillet 2010 relatif à l’évaluation et la gestion de la qualité de l’air ambiant ;
  • l’Arrêté ministériel du 31 janvier 2005 délimitant les zones et agglomérations pour l’évaluation et la gestion de la qualité de l’air ambiant.
  • le Décret du 11 mars 1999 relatif au permis d’environnement, ainsi que l’ensemble des arrêtés d’exécution.

La législation en matière de permis d’environnement prévoit notamment que les permis des établissements concernés doivent être actualisés dans un délai de quatre ans à compter de la publication des décisions concernant les conclusions sur les Meilleures Techniques Disponibles (MTD).

Plus d’informations sur ces obligations dans la partie législation ici